"Le mandat de DSC, c'est loin d'être plan-plan". Entretien avec Guy Delatour, DSC de SItel France, de la branche des prestataires de service

Publié le 05/04/2022

Pas évident d’attraper Guy Delatour, le délégué syndical central (DSC) de Sitel France : en plein débrayage, il trouve quand même un petit moment entre deux débriefs avec les autres DS, pour échanger sur ces mandats. 

Suppléant au CSE de son site de rattachement pour garder un pied dans l’instance locale, Guy est aussi responsable développement organisation formation (DOF) pour le syndicat S3C Champagne-Ardenne : 1300 adhérents répartis dans les départements des Ardennes, de la Marne, de l’Aube, et de la Haute-Marne. Habitant lui-même à Troyes, il se rend au siège du syndicat à Reims une fois par semaine. « Je devais m’y rendre aujourd’hui mais les évènements sur le site global m’ont rattrapé. »

Les augmentations successives du salaire minimum de croissance placent désormais 80% des coefficients de la grille de la CCN des prestataires de service au niveau du SMIC. Et bien que la direction de Sitel France fasse la sourde oreille, la CFDT, FO, la CFTC et la CGT revendiquent le doublement de l’indemnité énergie accordée par l’État. 
Les discussions sont compliquées mais le syndicaliste compte sur le poids de Sitel France dans le secteur - 6000 salariés, 11 sites répartis sur tout le territoire - pour réinstaurer un rapport de force dans l’entreprise. « Les DSC ont un rôle à jouer dans le rapport de force. C’est la base d’un bon dialogue social. »

Objectif : ré augmenter les rémunérations des coefficients à partir du bas, et par effet domino, faire progresser celles des coefficients du haut. D’où la demande du doublement de la prime énergie ; une revendication symbolique puisque dans quelques mois, les NAO vont commencer dans toutes les entreprises du groupe. 
Tous les DS ont été mobilisés dans leurs sections pour appeler les salariés à poser leurs casques de 8h à 11h le jeudi 17 février (jour de l’entretien), aussi bien à Tarbes, qu’à Pau, Nancy ou La Rochelle. « Dans une branche où il y a 60% de télétravailleurs, il faut trouver des solutions pour joindre rapidement les salariés. » Les adhérents ont ainsi relayé l’info aux collègues non adhérents via les réseaux sociaux. 
En plus de la progression du pouvoir d’achat, Guy veut accélérer le renouvellement générationnel, « on a beaucoup de jeunes chez les prestataires de service mais encore faut-il les attirer vers des mandats syndicaux. » Le DSC combine ainsi des actions de visibilité avec des actions revendicatives, sur les plateformes numériques comme sur les sites (animations sportives, prévention contre la malbouffe, prime mobilité…)

Le syndicalisme commence pour lui en 2007, par l’intermédiaire d’une femme de dirigeant d’une boîte import-export en Afrique. Pour finir sa carrière, elle entre dans un centre d’appel et prend des responsabilités syndicales. Guy se souvient : « Elle n’avait rien à gagner en choisissant de défendre les salariés et s’attirer les emmerdes qui s’ensuivent, et pourtant elle y est allée » se souvient Guy. Ses convictions le convainquent de l’aider et entrer dans le militantisme. 
Il commence par un mandat de suppléant au CE qui le familiarise avec la culture et le fonctionnement d’un syndicat. Élu peu après titulaire au CE, il devient trésorier adjoint au niveau local de son site, puis au comité central d’entreprise il y a 10 ans. 
Quand la société fusionne en 2010 et prend le nom de Sitel, le troyen récupère à ce moment-là des responsabilités au niveau national. 
Guy Delatour confie : « même si on n’imagine pas de hiérarchie dans les syndicats, comme on manque souvent de temps, pour être efficace, il faut savoir être directif ». Il regrette un peu que le degré d’engagement ne soit pas toujours le même entre les salariés et les militants qui, , à raison, font valoir le droit à la déconnexion. 
« C’est un sacerdoce d’être militant syndical ! » tant ses deux mandats sont chronophages et exigent anticipation. Même s’il y a toujours des imprévus individuels ou collectifs de dernière minute à gérer : « une, deux, voire trois tuiles par jour en moyenne ! » Une gageure pour le syndicaliste de trouver un peu de temps pour lui.

Mais alors qu’est-ce qui l’anime depuis 12 ans ? « Les relations humaines ! » répond Guy Delatour, enthousiaste. « Le DSC fait vivre un collectif de délégués syndicaux fondé sur l’échange de points de vue. C’est le débat qui fait vivre le syndicalisme ! » 
Et lorsqu’il arrive à convaincre un jeune adhérent de prendre des responsabilités syndicales et défendre les valeurs de la CFDT, alors là, Guy savoure son plaisir...